Economies à l'hôpital : quel impact pour les patients ?

C'est le coup de rabot de trop... La ministre de la Santé avait promis une réforme globale d'un système de santé sous pression. Les hôpitaux devront plutôt continuer à se serrer la ceinture pour limiter les dépenses de l'Assurance maladie.

La rédaction d'Allo Docteurs
La rédaction d'Allo Docteurs
Rédigé le , mis à jour le
Entretien avec Alain-Michel Ceretti, président de France Assos Santé
Entretien avec Alain-Michel Ceretti, président de France Assos Santé

En 2018, les montants remboursés aux hôpitaux par l'Assurance maladie vont encore baisser. Ce sont les établissement publics, déjà en grandes difficultés, qui devront faire le plus d'efforts. La tarification des actes va ainsi baisser de 1,2% en 2018. C'est plus que pour les cliniques privées. Pour elles, la baisse ne sera que de 0,9%.

S'ils veulent rester à l'équilibre, les hôpitaux devront donc chercher de nouvelles sources d'économies. Quelles seront les conséquences pour les patients ? Alain-Michel Ceretti, président de France Assos Santé répond à nos questions.

  • Aujourd'hui, les hôpitaux sont surendettés. Comment ces difficultés économiques se répercutent-elles sur les patients ?

Alain-Michel Ceretti, président de France Assos Santé : "Le déficit des hôpitaux publics n'a rien de nouveau. Mais aujourd'hui, nous avons des retours très clairs de ce qui se passe sur le terrain. Ca commence à tous nous toucher en tant que malades. Nous nous apercevons qu'il n'y a pas suffisamment de personnel, les médecins n'ont plus le temps, plus personne n'a le temps... L'hôpital se dégrade au niveau du bâtiment mais aussi au niveau de ses installations. Il n'y a plus d'argent pour de nouveaux investissements. Il n'est plus question actuellement d'améliorer la situation mais de la sauvegarder. Ce qui nous pend au nez, c'est d'avoir un réel système de santé et de soins à deux vitesses, avec d'un côté les établissements qui peuvent se payer de nouveaux outils et de l'autre, des établissements qui se dégradent. Il va falloir faire le choix entre la proximité et la qualité."

  • Les établissements publics sont beaucoup plus mis à contribution que les établissements privés. Pourquoi cette dichotomie ?

Alain-Michel Ceretti : "Il faudra poser la question à la ministre de la Santé. Mais la tarification à l'activité est, osons les mots, un véritable cancer de notre système de santé. Il a été dévoyé. Se concentrer sur les actes médicaux, c'est valoriser l'organe et oublier le malade qui est autour. Il faut revoir le système. Et revoir le système, c'est admettre que ce qu'on a mis en place il y a quinze ans ne fonctionne pas comme ça devrait. Les dérives sont réelles."

  • Quelles sont ces dérives ?

Alain-Michel Ceretti : "Le directeur du CHU de Clermont-Ferrand a émis un document. Il est daté du 29 janvier 2018. Il s'agit ni plus, ni moins d'une lettre destinée à remonter les bretelles d'un chef de service… On lui reproche « une diminution sensible du nombre d'interventions sur la thyroïde ». Ce n’est pas normal. Autrement dit, il faut trouver des femmes qui ont une thyroïde malade, même s'il n'y en a pas. Il faut les trouver.

"Deuxièmement, alors que les durées d'hospitalisation se raccourcissent, que partout est encouragé ce qu'on appelle l'ambulatoire - on arrive le matin, on repart le soir-  la direction de l'hôpital reproche à ce chef de service d’avoir suivi les consignes. Autrement dit, les malades il faut les garder et il faut leur faire la totale côté examens, même si cela n'est pas nécessaire. Il faut produire plus d'activité, et à tout prix. Personne ne vous le dira de cette manière, mais c'est la réalité."