Crise de l’hôpital : 660 médecins menacent de démissionner

Des chefs de service et des médecins hospitaliers exigent l'ouverture de nouvelles négociations pour résoudre la crise des hôpitaux. Le manque de budget et les postes toujours vacants leur font craindre la survenue d'une crise sanitaire.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Crise de l’hôpital : 660 médecins menacent de démissionner

"Les médecins hospitaliers ont eu beau sonner l'alarme, la rigueur est devenue austérité, puis l'austérité, pénurie." Dans une tribune parue le 15 décembre dans le Journal du Dimanche, 660 médecins déplorent l'absence de réponse correcte du gouvernement à la crise des hôpitaux. "Nous devons donc nous résoudre aujourd'hui à un mouvement de 'désobéissance' inédit" écrivent-ils dans ce texte.

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Message de désespoir

Ces chefs de service, responsables d’unités de soins et médecins participant à la gestion des hôpitaux se disent ainsi prêts à "démissionner si la ministre (de la Santé, ndlr) n'ouvre pas de réelles négociations pour desserrer la contrainte imposée à l'hôpital public".

Parmi eux, le professeur Xavier Mariette, chef de service à l’hôpital Bicêtre qui explique adresser dans cette tribune un message de désespoir. "Le conflit dure depuis neuf mois aux urgences et depuis trois mois dans l’ensemble de l’hôpital et nous avons l’impression de ne pas être entendus" confie-t-il à Allodocteurs.fr.

Les annonces gouvernementales sont "une goutte d’eau"

Les signataires, venus de "toutes spécialités, de tous hôpitaux, de toutes régions" et membres du collectif Inter-hôpitaux regrettent en somme que "le vrai ministère de la Santé (soit) désormais à Bercy".

Ils rappellent en effet la " grève du codage " mise en place dans certains établissements il y a plusieurs mois pour bloquer "la facturation des séjours hospitaliers à la Sécurité sociale". Puis les manifestations du 14 novembre qui ont réuni plusieurs milliers de soignants dans toute la France.

"Las : les mesures gouvernementales se résument pour 2020 à moins de 300 millions", poursuivent les signataires dans la tribune. "Une goutte d’eau pour quelques primes allouées à quelques types de personnel mais qui ne permet pas d’embaucher du personnel et d’ouvrir des lits" déplore aussi le professeur Mariette qui rappelle qu’il manque 1,3  milliard d'euros pour répondre à la seule augmentation programmée des charges.

Une démission "symbolique"

Et depuis ces annonces jugées insuffisantes, aucune autre mesure gouvernementale n’a été proposée. "Nous avons envoyé une demande pour être reçus par le Premier ministre le 9 décembre mais nous n’avons reçu aucune réponse à ce jour" témoigne le professeur Mariette.

La seule chose qu’il leur reste à faire est donc, selon ce chef de service, "un geste symbolique". En pratique, la démission de 1.000 médecins hospitaliers "ne changera rien" explique le professeur Mariette : "on continuera à s’occuper des patients bien sûr, à former les étudiants, à assurer nos cours et à faire de la recherche. Mais on sera en légitimité de refuser certaines tâches administratives."

Et tout se jouera dans les prochains jours : le 17 décembre, les soignants sont à nouveau appelés à manifester. "Si le 18 décembre, au lendemain de la manifestation, nous ne constatons aucune avancée dans les négociations et si nous réunissons plus de 1.000 signataires, notre démissions sera effective" promet Xavier Mariette.

Une manifestation effacée par la grève nationale

En effet, après neuf mois de crise à l'hôpital public, médecins, soignants ou encore internes sont de nouveau appelés à se mobiliser partout en France le 17 décembre, par des collectifs Inter-Hôpitaux et Inter-Urgences rejoints par des organisations de praticiens et des syndicats. Problème : cette manifestation, dont la date a été décidée il y a trois semaines, tombe le même jour que la troisième journée de mobilisation contre la réforme des retraites. De fait, "je crains que notre manifestation soit inaudible et illisible" déplore le professeur Mariette.

Pourtant il y a urgence, selon ces chefs de service. "Aujourd’hui les postes sont vacants et on ferme des lits car il n’y a plus d’attractivité à l’hôpital public" constate Xavier Mariette. Et "si rien n’est fait, une mauvaise grippe, une canicule ou une bronchiolite plus sévère que d’habitude déclencheront une crise sanitaire" s’inquiète enfin le médecin.