Affaire des laits contaminés : de nouveaux éléments contre Lactalis

Rétention d'informations par le groupe, plainte contre X déposée par Foodwatch, témoignage d'une employée de l'usine sur les mauvaises conditions d'hygiène... Le groupe Lactalis toujours au coeur de la tourmente. 

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Affaire des laits contaminés : de nouveaux éléments contre Lactalis

Les plaintes et les éléments contre Lactalis s'accumulent au fil des semaines. Ce 13 février, la direction générale de l'Alimentation (DGAL) a révélé que Lactalis n'avait pas transmis aux autorités les résultats d'autocontrôles positifs à la salmonelle de son usine de Craon.

Auditionné par les commissions des affaires économiques et sociales du Sénat, son directeur Patrick Dehaumont a déclaré constater "un décalage entre les éléments donnés au niveau de l'inspection et ce qu'on a pu récupérer comme autocontrôles suite à la crise", précisant que les autocontrôles d'environnement [1] positifs faisant apparaître la salmonelle ne lui ont pas été transmis.

"Au-delà du fait que ça n'ait pas été transmis, ce qui est dommage, c'est qu'il n'y ait pas eu un questionnement au niveau de l'entreprise sur le fait que c'était quand même étonnant de retrouver une Salmonella agona à plusieurs reprises au fil des années, alors qu'on l'avait trouvée en 2005" (avant son rachat par Lactalis, NDLR).

Une trop grande "négligence", selon Foodwatch

Ce 14 février, l’association de consommateurs Foodwatch a annoncé porter plainte contre X "pour douze infractions" en lien avec la contamination des laits infantiles par les salmonelles, et mettant en cause le fabricant de laits infantiles, la grande distribution, un laboratoire et les autorités.

Karine Jacquemart, directrice de Foodwatch, a déclaré que "les législations tant européennes que françaises font peser de nombreuses obligations sur tous les acteurs de la chaîne alimentaire. Producteurs, distributeurs, laboratoire et bien sûr autorités publiques ne pouvaient les ignorer". "Et pourtant, ils ont fait preuve de négligence", poursuit-elle.

Les infractions relevées par l’association vont de la mise sur le marché d’un produit préjudiciable à la santé à l’inexécution d’une procédure de retrait ou de rappel d’un produit, en passant par la tromperie aggravée et la mise en danger d'autrui ou encore l'exportation vers un pays tiers à l’Union européenne d’une denrée alimentaire préjudiciable à la santé.

Une cinquantaine de familles portent plainte contre Lactalis

Sept familles se sont associées à cette plainte, qui vient s'ajouter à au moins une douzaine de plaintes déjà enregistrées au pôle santé publique du parquet de Paris, chargées de les centraliser dans le cadre d'une enquête pour "blessures involontaires" et "mise en danger de la vie d'autrui" ouverte le 22 décembre. Ce 15 février, 30 familles porteront à leur tour plainte contre l’industriel et plusieurs groupes de distribution.

Le témoignage gênant d'ue employée de l'usine de Craon

Dans un témoignage recueilli anonymement par Le Parisien et publié ce 13 février, une intérimaire de l’usine a dénoncé de nombreux problèmes d’hygiène dans la zone de productions des laits infantiles. Elle point du doigt un décalage entre les règles d’hygiène très strictes et leur mise en application : chaussures de sécurité rapportées au domicile, mains non lavées au retour des pauses…

Le témoignage évoque divers incidents, parmi lesquels le reconditionnement de poudre réalisés "sans masque, ni gants" (alors que les mains des employés "ne sont pas censées être en contact avec le lait en poudre"), ou le nettoyage occasionnel des tuyaux des machines avec des balais destinés à nettoyer le sol. "Les intérimaires font les tâches les plus ingrates et se fichent des règles. Ils ne sont pas assez surveillés", estime le témoin, qui relève que "de nombreux conducteurs de ligne et employés" travaillant à la fabrication des laits infantiles étaient, eux, "très méticuleux".

la rédaction d’Allodocteurs.fr, avec AFP


[1] "Dans l'environnement" signifie que la bactérie peut avoir été retrouvé sur un mur, un parquet ou un outil, mais pas dans l'aliment fabriqué lui-même. (NDLR)

L'épidémie de 2005 avait touché 146 nourrissons. Celle de 2017 en a affecté 37 en France, ainsi que deux en Espagne et un autre probable en Grèce.  La bactérie en a également contaminé 25 autres entre 2006 et 2016, selon l'Institut Pasteur. Le bilan dépasse donc 200 enfants malades à cause d'une souche unique.