Prisons : la situation "accablante" des détenus malades psychiatriques

Adeline Hazan, contrôleure des prisons, met en garde contre la crise de la psychiatrie dans les prisons françaises : les pathologies et les risques qu’elles impliquent sont aggravés par l’enfermement et l’isolement.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Le détenu est probablement décédé d'une péritonite selon l'autopsie.
Le détenu est probablement décédé d'une péritonite selon l'autopsie.

Selon Adeline Hazan, la prise en charge des détenus atteints de troubles mentaux est loin d’être suffisante. La contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL) a publié un avis pour l'expliquer ce 22 novembre.

"Des pathologies lourdes aggravées par l'enfermement et l'isolement, un risque de suicide accru et des conditions de détention qui perturbent l'accès aux soins, nuisent à leur efficacité et, finalement, privent la sanction pénale de son sens": la situation est très sombre pour la CGLPL, Adeline Hazan.

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Des études anciennes ou partielles

"Les pathologies mentales constituent un facteur d'aggravation de la souffrance des personnes détenues, alourdissent la charge de l'administration pénitentiaire et sont aggravées par des conditions de détention inadaptées", écrit-elle encore.

La contrôleure regrette que les études sur le sujet soient "anciennes ou partielles". Selon l'une d'elles, datée de 2007, huit détenus masculins sur dix souffrent d'au moins un trouble psychiatrique et, parmi eux, 24% souffrent d'un trouble psychotique.

Un manque d’accès aux soins plus général

Les moyens pour l'accès aux soins sont "insuffisants". "La progression inquiétante du nombre de détenus en maisons d'arrêt et la surpopulation chronique qui en découle n'ont pas été accompagnées d'un développement des moyens de santé", déplore Mme Hazan.

"La crise démographique de la psychiatrie française se ressent de manière plus sensible en prison qu'ailleurs", ajoute-t-elle.

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Une prise en charge très insuffisante

La prise en charge des malades est organisée à trois niveaux: en ambulatoire dans les unités sanitaires en milieu pénitentiaire, en hospitalisation de jour et en hospitalisation complète (notamment dans des services psychiatriques de proximité).

L'accès aux soins ambulatoires et à l'hospitalisation de jour "est très inégal" selon le lieu de détention, critique la contrôleure. Elle dénonce aussi une continuité des soins "insuffisante", ce qui conduit certains patients à entrer dans "un cycle sans fin d'hospitalisations et de retours en détention après un rétablissement toujours incomplet".

Déplacer les détenus souffrant de pathologies mentales lourdes ?

La CGLPL considère qu'"une personne souffrant d'une pathologie mentale nécessitant une prise en charge de longue durée (...) n'a pas sa place en prison" mais doit "être orientée vers un établissement de santé".

Elle recommande "le développement de structures hospitalières sécurisées afin d'assurer une prise en charge adaptée, y compris de longue durée, aux personnes détenues souffrant de troubles mentaux".

Former les surveillants de prison à ces problématiques

Mme Hazan demande par ailleurs une formation des surveillants de prison "à la détection et à la gestion des troubles mentaux de la population pénale".

Actuellement, la prise en charge des personnes dépressives ou atteintes de troubles psychotiques "n'est pas abordée" dans leur formation, axée sur la sécurité.