Saturnisme : les enfants exposés aux poussières de plomb

Les poussières de plomb présentes dans les espaces publics extérieurs représentent un risque de contamination pour les jeunes enfants, alerte l’Agence nationale de sécurité sanitaire.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Saturnisme : les enfants exposés aux poussières de plomb
Crédits Photo : © Joshua Choate / Pixabay

Incinération des déchets, combustion du charbon, métallurgie, incendies… Des activités industrielles et des accidents, comme l’incendie de Notre-Dame de Paris, émettent des poussières de plomb dans l’atmosphère qui se déposent ensuite sur les trottoirs, les routes, les parcs et les cours d’écoles. Mais dans quelle mesure ces poussières représentent-elles un risque pour la santé des enfants qui jouent en extérieur ?

S’il s’agit bien d’une source potentielle de contamination, en particulier pour les plus jeunes, il est encore difficile de quantifier cette exposition, avance un rapport de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) publié le 7 février 2020.

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Un impact sur le taux de plomb dans le sang ?

Après les inquiétudes provoquées par l’incendie de Notre-Dame de Paris le 15 avril 2019, qui a fait fondre 300 tonnes de plomb contenues dans la charpente de la flèche et la toiture, les autorités ont posé deux questions à l'Anses : est-ce que ces poussières sont une source d'exposition au plomb pour la population ? Et si oui, à quel degré par rapport aux sources déjà connues ?

Il existe très peu d'études, en France ou ailleurs, mais les données disponibles montrent qu'"il est pertinent de considérer les poussières déposées sur les surfaces d’espaces publics extérieurs comme source d’exposition", répond l'Agence, qui juge que la contamination de ces surfaces peut avoir un impact sur la plombémie, le taux de plomb dans le sang. Mais "on a du mal à quantifier cette exposition, à dire si c'est plus ou moins important que les autres sources d'exposition", ajoute Guillaume Boulanger, adjoint au sein de l'unité d'évaluation des risques liés à l'air de l’Anses.

Se laver les mains et se déchausser

Malgré ce manque de données, le rapport identifie des populations à risque avec, en premier lieu, les jeunes enfants. Et pour cause : leur métabolisme absorbe plus facilement ce produit qui, chez eux, peut être toxique même à faible dose. Le fait qu'ils portent à la bouche leurs mains, jouets et autres objets ayant trainé par terre est également un facteur de risque, la contamination semblant se faire principalement par ingestion des poussières de plomb.

Et lorsqu'une situation à risque est repérée, il faut mettre en place des "gestes de prévention", comme se laver souvent les mains ou se déchausser avant de rentrer chez soi. En outre, la plombémie de l'enfant "doit être mesurée", recommande l'Anses.

Un risque aussi pour les travailleurs

Mais les jeunes enfants ne sont pas les seules personnes à risque. L'Anses insiste en effet sur la nécessité de protéger les travailleurs exposés aux poussières extérieures contaminées, en mesurant leur plombémie.

Elle préconise pour eux la mise en place d'"un suivi médical renforcé" si les valeurs biologiques de référence sont dépassées, valeurs qui devraient d'ailleurs être largement abaissées, estime-t-elle.

Cartographie nationale

A long terme, l'Agence appelle surtout à réaliser de nouvelles mesures environnementales ciblées sur les lieux fréquentés par les enfants, pour estimer l'exposition de la population à ces poussières. "Quand on aura ces données, on pourra les utiliser pour établir un seuil et dire par exemple, il faut nettoyer cette aire de jeu", commente Guillaume Boulanger, qui note qu'obtenir une cartographie nationale pourrait prendre des années.

A Paris, en revanche, l'Agence Régionale de Santé (ARS) a déjà enclenché le processus après l'incendie de la cathédrale et espère avoir d'ici fin 2020 des éléments pour dresser un état du "bruit de fond" du plomb à Paris, c'est-à-dire la pollution indépendante de Notre-Dame. "Les sources de plomb sont très nombreuses à Paris", rappelle le directeur de l’ARS Aurélien Rousseau, notant que l'incendie a remis le sujet "en haut de la pile".

Aujourd'hui, les principales sources connues d'exposition au plomb sont l'eau, l'alimentation, ou la peinture au plomb dans les vieux immeubles. "Quand la concentration de plomb dans l'eau dépasse une certaine valeur, vous devez changer les canalisations", rappelle Guillaume Boulanger. Des règles existent aussi pour les sols pollués, ou l'alimentation, mais malheureusement "pas pour ces poussières" qui se déposent sur les routes ou les aires de jeux, explique-t-il enfin à l'AFP.