Non, le vin ne protège pas contre le covid

Une revue viticole prétend que la consommation de vin protègerait du coronavirus. On vous explique pourquoi ce raccourci est trompeur et ce que montre vraiment l’étude scientifique citée.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Image d'illustration.  —  Crédits photo : © Shutterstock / Africa Studio

"Une nouvelle étude confirme que le vin protège de la covid-19" titrait la revue Vitisphere le 2 février.* Mais attention aux raccourcis pris par cette revue spécialisée… dans l’œnologie et le commerce du vin.

A l’origine de cet article, une étude publiée en décembre 2020 par des chercheurs de l’université de médecine de Taïwan dans la revue American Journal of Cancer Research.  Selon ces scientifiques, un composé présent dans plusieurs boissons et aliments, l’acide tannique, inhibe l’activité du coronavirus et l’empêche de pénétrer dans les cellules. De là à dire que le vin, puisqu’il en contient, protège contre le covid, le fossé est grand.

Une étude uniquement in vitro

Et pour cause : tout d’abord, l’étude a été menée in vitro, en laboratoire, sur des cultures de cellules. Si l’acide tannique semble inhiber l’activité d’une protéine du virus et bloquer son entrée dans les cellules, cela n’a été observé que sur ces cultures. Aucune preuve de l’efficacité de l’acide tannique contre le virus in vivo, chez un humain qui en consomme, n’a été démontrée.

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40.000 morts de l’alcool par an

Ensuite, d’autres aliments et boissons, moins nocifs que le vin, contiennent cet acide : le thé par exemple, mais aussi le raisin, le kaki, la framboise ou le sorgho. Si une efficacité de l’acide tannique contre le covid était démontrée, ces aliments seraient à privilégier avant le vin.

Car le vin, qui contient de l’alcool, reste une boisson dangereuse pour la santé dont les effets toxiques sur l’organisme sont, eux, bien connus. Chaque année, l’alcool est responsable de plus de 40.000 morts en France et reste la deuxième cause de mortalité évitable après le tabac, rappelle notamment Santé publique France.

"Science et lobby du vin, ce n’est pas pareil"

Les chercheurs taïwanais ne concluent d’ailleurs à aucun moment dans leur étude que le vin est recommandé contre le covid. Ils mentionnent uniquement le vin comme étant une boisson qui contient ce fameux acide tannique.

Le raccourci a ensuite été fait par le lobby du vin et l’étude s’est transformée en un séduisant argument en faveur de la consommation de vin. "Science et lobby du vin, ce n'est pas pareil" rappelait en réaction à cet article le professeur Axel Kahn, généticien et président de la Ligue Nationale contre le Cancer, sur Twitter.

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*Titre modifié le 5 février. Le nouveau titre "Une nouvelle étude étaye l'hypothèse d'un effet protecteur des composés du vin contre la covid-19" a été corrigé "suite à des retours de lecteurs", selon la revue Vitisphère.