Fin de la pub, affichage des calories... l’Académie de médecine durcit les recommandations anti-alcool

L’Académie de médecine appelle à des mesures fortes contre la consommation d'alcool : fin de la publicité sur internet, affichage des calories et des grammes d'alcool ou encore mise en avant du pictogramme pour les femmes enceintes.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Fin de la pub, affichage des calories... l’Académie de médecine durcit les recommandations anti-alcool

"Pour la première fois depuis la Seconde guerre mondiale, la consommation d'alcool ne baisse plus en France. C'est une défaite majeure pour la santé publique", estime l'Académie nationale de médecine dans un communiqué publié le 29 avril 2019. En effet, dans des chiffres publiés en février dernier, Santé publique France indiquait que la consommation d’alcool des Français n'avait quasiment pas reculé depuis 10 ans.
Face à ce constat, l’Académie appelle donc les pouvoirs publics à "prendre des mesures plus fortes" pour lutter contre les problèmes de santé publique causés par cette consommation stagnante d'alcool en France.

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  • Bannir la publicité sur internet

Première recommandation de l’Académie : revenir aux principes initiaux de la loi Evin, malmenée depuis 30 ans dans le domaine de l’alcool "sous la pression du lobby alcoolier". En effet, la loi Evin votée en 1991 et relative à la lutte contre l'alcoolisme et le tabagisme avait notamment été assouplie en 2015 lors de la différenciation entre information et publicité sur l'alcool, autorisant de fait la promotion de viticulteurs et de régions viticoles.

Le principal média visé est ici internet et la publicité pour l’alcool qui y est actuellement autorisée, alors qu’il s’agit d’un support médiatique "particulièrement affectionné des jeunes". Une observation d’autant plus inquiétante que "50% des élèves de sixième ont déjà expérimenté l’alcool" et que "20% des élèves de terminale sont des consommateurs réguliers", rappelle l’Académie de médecine dans son communiqué.

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  • Calories, grammes et "abus" d’alcool

Autre mesure phare recommandée par les Académiciens : la révision totale de l’étiquetage des contenants de boissons alcoolisées. Celui-ci devrait notamment renseigner la quantité d’alcool en grammes mais aussi le nombre de calories. Car, comme nous l’explique le professeur Gérard Dubois, chef du service de santé publique à l’hôpital d’Amiens et membre de l'Académie de médecine, "un verre standard de vin ou de bière contient 70 kilocalories, mais l’alcool continue d’être le seul type de boisson à être exempté du comptage calorique". En cause : "l’influence des lobbys pour ne pas effaroucher celles et ceux qui veulent garder la ligne" déplore le professeur Dubois.

Quant à la mention "l’abus d’alcool est dangereux pour la santé", ce slogan bien connu devra aussi être rénové, selon l’Académie, pour devenir, plus simplement, "l’alcool est dangereux pour la santé". En effet, "les consommateurs ont tendance à penser que 'l’abus' fait toujours référence à celles et ceux qui boivent plus qu’eux" observe le professeur Dubois.

  • Protéger les femmes enceintes

Dernière recommandation, l’Académie souhaite améliorer la visibilité du pictogramme visant à dissuader la consommation des femmes enceintes. "Essayez de trouver ce pictogramme sur une bouteille de vin ou de bière, il est tout petit, invisible et on ne le comprend pas" s’indigne le professeur Dubois. Pourtant, "il est primordial que les femmes enceintes et celles qui expriment un désir de grossesse comprennent que la consommation d’alcool est dangereuse" martèle le médecin. "Il faut faire de ce pictogramme quelque chose de très clair. Malheureusement, cela fait des années que des discussions ont lieu et le lobby alcool s‘y oppose toujours farouchement" ajoute le professeur.

  • Maximum deux verres par jour et pas tous les jours

Et, contrairement au tabac dont l’objectif est une consommation nulle, "l’objectif pour l’alcool est une consommation raisonnable car il s’agit d’un produit accepté dans la société" note l’Académicien. Difficile, donc, d’envisager des mesures aussi drastiques pour l’alcool que pour le tabac, régi notamment par les paquets neutres et les images chocs. C’est également pourquoi le nouveau message de prévention de Santé publique France "Pour votre santé, c'est maximum deux verres par jour, et pas tous les jours" reste tolérant vis-à-vis d’une faible consommation, "même s’il s’agit de repères de consommation et non de conseils", rappelle le professeur Dubois.

L'alcool constitue la deuxième cause de mortalité évitable après le tabac, avec 41.000 décès qui lui sont attribuables chaque année en France. Mais le fardeau sanitaire et social ne s'arrête pas aux décès, puisque l'alcool est aussi la première cause de retard mental de l'enfant et de démence précoce et qu'il est impliqué dans 40% des violences faites aux femmes et aux enfants, souligne enfin l'Académie de médecine.