Oeufs contaminés : le fipronil, un insecticide pas si toxique

Des dizaines de millions d’œufs ont été retirés de la vente en Europe, après que des taux de fipronil supérieurs aux normes de l’UE aient été détectés. Cet insecticide, utilisé surtout contre les poux, est strictement interdit chez les animaux destinés à la consommation humaine, mais est très peu toxique.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Oeufs contaminés : le fipronil, un insecticide pas si toxique

Le scandale va sans doute entraîner la morts de millions de poule, abattues par leurs éleveurs à cause du fipronil détectés dans leurs oeufs. Aux Pays-Bas, en Allemagne, au Royaume-Uni et en France, les taux de fipronil dépassaient parfois largement les seuils autorisés par la réglementaiton européenne. "Treize lots d'oeufs contaminés en provenance des Pays-Bas" ont été livrés en juillet à des entreprises de transformation alimentaire situées dans l'ouest de la France, selon le ministère français de l'Agriculture. Mardi, les autorités sanitaires néerlandaises portaient également leur attention sur la viande de poulets, potentiellement contaminée.

Le fipronil est interdit sur les animaux consommés par l’homme, mais il ne présente pas réellement de danger, et cette molécule est même utilisée sur nos animaux domestiques.

Qu’est-ce que le fipronil ?

Le fipronil est utilisé dans les produits phytosanitaires en tant qu’insecticide. Il permet de lutter contre les "ravageurs des cultures, les puces des animaux familiers, les termites et les fourmis", selon le rapport rendu en 2005 par l’AFSSA (1) et l’AFSSE (2), destiné à évaluer les risques pour la santé humaine du fipronil. Il est utilisé depuis 1994 et se retrouve aussi bien dans des préparation utilisées par les agriculteurs ou les jardiniers et dans des médicaments vétérinaires.

Comment se retrouve-t-il dans les œufs et la viande ?

Le fipronil est soluble dans la graisse et peut donc se retrouver dans le lait si des vaches le consomment, dans les œufs des poules et bien évidemment dans la viande. C’est pourquoi il est interdit de l’utiliser sur les animaux destinés à la consommation humaine.

Il est toutefois courant de retrouver du fipronil dans la composition des colliers anti-puces pour chats et pour chiens. Une application autorisée et sans risque d’en ingurgiter en trop grande quantité, puisque ces objets se trouvent à un endroit où l’animal ne peut se lécher.

Le fipronil est-il toxique ?

"On n’a jamais vu de cas d’intoxication chez l’homme", affirme Jean-François Narbonne, professeur émerite en toxicologie alimentaire et l’un des auteurs du rapport de 2005 de l’AFSSA et de l’AFSSE. Chez le rat, bien plus sensible, l’exposition à long terme à une forte concentration de fipronil peut atteindre le foie, les reins et la tyrhoïde. Les abeilles sont aussi vulnérables, ce qui explique que l’usage de cet insecticide sur les semences de maïs est interdit dans l’Union européenne depuis 2013. La dose léthale chez l’homme est 100 fois supérieure à la nicotine, produit déjà peu dangereux et qui se classe, comme le fipronil, parmi les neurotoxiques.

"C’est la dose qui fait le poison, poursuit l’ancien professeur. Si les éleveurs avaient mis des grandes quantités de fipronil, ils auraient tué les poules." Plutôt que l’homme, qui ne risque dans cette histoire que de consommer des traces de la molécule, sans que cela ne présente de danger. Les normes, les "limites maximales de résidus" (3), existent d’abord pour prévenir une ingestion à long terme, dans le lait notamment. "Cela pourrait entraîner un mal de tête, détaille Jean-François Narbonne. A forte dose on peut tomber dans le coma.' Mais il faudrait respirer une solution concentrée, une hypothèse improbable. Le fipronil est bien moins problématique que d’autres types insecticides, comme le DTT ou les dérivés du pyrèthre.

Le danger pour la santé publique dans le cas des œufs contaminés est donc quasi-inexistant. Les autorités européennes et nationales doivent simplement corriger ce non-respect de la réglmentation pour éviter la généralisation de l’usage du fipronil.

 

(1) Agence française de sécurité sanitaire des aliments. A fusionné en 2010 avec l’AFSSET pour former l’ANSES, l’Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail.

(2) Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement (AFFSE) Ancêtre de l’AFFSET.

(3) Une "limite maximale de résidus" ou LMR est définie par le Codex Alimentarius comme la concentration maximale du résidu d'un pesticide (exprimée en mg/kg) autorisée officiellement dans/sur des produits alimentaires ou des aliments pour animaux