Sécurité des médicaments : trois questions à Bruno Toussaint (Prescrire)

Suite à la publication d'une liste de "médicaments à écarter" par la revue médicale Prescrire, la Fédération des entreprises du médicament (Leem) s'est exprimée contre une "confusion des genres" qui met en jeu "la confiance dans le médicament". Comment cette nouvelle "liste noire" a été déterminée ? Entretien avec Bruno Toussaint, directeur de la revue Prescrire.

Setti Dali
Rédigé le
Sécurité des médicaments : trois questions à Bruno Toussaint (Prescrire)
  • Comment avez-vous mené l'enquête ?

Bruno Toussaint  : "Ce n'est pas vraiment une enquête mais plutôt une sorte de recensement de tous les médicaments qui au cours de leur existence, ont provoqué des effets indésirables. Nous avons observé la surveillance de ces médicaments dans toutes les agences du médicament du monde entier. Cela fait partie du travail de notre revue Prescrire, depuis 1981 : examiner les médicaments et suivre leurs effets indésirables."

  • Pourquoi demandez-vous le retrait de ces médicaments ?

Bruno Toussaint  : "Il existe sur le marché des médicaments dont l'efficacité n'est pas prouvée et qui ont de gros effets indésirables. Nous pensons que cela suffit pour décider de leur retrait. Pourquoi attendre plus longtemps ?

"Prenons l'exemple des pilules de 3ème génération. Dans les années 90, c'étaient les meilleures pilules. Puis au début des années 2000, on s'est aperçu qu'elles étaient plus dangereuses que les pilules de 2ème génération. A l'époque, nous l'avions vu, signalé et répété. En vain. Les autorités sanitaires les ont laissées sur le marché. C'est seulement aujourd'hui que l'Agence du médicament se décide à les retirer. Alors qu'au final, on le savait depuis 10 ans déjà."

  • Que faut-il faire pour améliorer la sécurité du médicament ?

Bruno Toussaint  : "L'affaire Médiator a permis le vote d'une réforme, et c'est très bien. Encore faudrait-il que les décrets soient prononcés et appliqués. Ce qui n'est pas le cas du Sunshine Act : ce décret oblige les firmes pharmaceutiques à dévoiler au public l'argent qu'elles versent aux médecins ou aux centres hospitaliers.

"Aux Etats-Unis, cette transparence existe depuis 2 ans. En France, le décret n'est toujours pas voté. D'autre part, on s'aperçoit que l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) n'est pas assez armée pour combattre les laboratoires pharmaceutiques. Il lui faut davantage de moyens financiers et juridiques."

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