Mon enfant n'aime pas l'école

Il n'est pas rare d'entendre des enfants dire qu'ils n'aiment pas l'école. De la maternelle au collège en passant par l'école primaire, ce blocage concerne tous les niveaux. Comment expliquer ce désamour pour l'école ? Difficulté passagère ou cause plus profonde... que se cache-t-il derrière cette attitude ? Comment se comporter face à un enfant qui prétend ne pas aimer l'école ? Les explications avec le Pr Philippe Duverger, pédopsychiatre.

La rédaction d'Allo Docteurs
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La première rentrée en maternelle, une séparation difficile

Début septembre approche et l'angoisse monte quand il s'agit de penser à la rentrée en petite section de maternelle. On redoute les séparations déchirantes et les pleurs difficilement consolables. Mais pourquoi ? Sans doute parce que la rentrée représente une première séparation, pour la mère, les parents comme pour l'enfant.

Cette entrée à la maternelle est aussi dramatisée. L'enfant reçoit une pluie de consignes : il faudra être sage, écouter, obéir à la maîtresse, être poli, manger à la cantine, être propre… Une interminable litanie d'injonctions et de contraintes qui se termine par : "et surtout ne pleure pas ! N'aie pas peur !" Et quand la maman pleure aussi (peut-être parce qu'elle se rappelle que cela avait été dur pour elle), cela signifie qu'il doit se passer des choses horribles à l'école. Cela ne donne pas vraiment envie de s'y rendre et de s'y soumettre.

L'école, une chance pas une menace

Pourtant, ce n'est pas grave d'aller à l'école, c'est une chance. Une double chance même. On y apprend plein de choses et on rencontre plein d'autres enfants. Certes, la rentrée scolaire des tout-petits est une situation nouvelle, mais rassurons-nous et rassurons-le, l'école est un lieu d'épanouissement formidable même si cela n'est pas toujours clair pour les enfants qui rentrent en maternelle.

Si les parents sont trop angoissés, je leur conseille de regarder le film Sur le chemin de l'école de Pascal Plisson, qui montre que les enfants ont des ressources formidables et qu'il est important de leur faire confiance. Les enfants vivent aux quatre coins du globe, mais partagent la même soif d'apprendre. Ils ont compris que seule l'instruction leur permettra d'améliorer leur vie, et c'est pour cela que chaque jour, dans des paysages incroyables, ils se lancent dans un périple à haut risque qui les conduira vers le savoir.

Désamour pour l'école : quand faut-il s'inquiéter ?

Quand un enfant plus grand ne veut pas aller à l'école (primaire ou secondaire), la situation est plus complexe, et parfois plus grave. On pourrait décliner quatre degrés de gravité.

  1. Le caprice. En cas de caprice, chaque parent doit avoir son idée sur la façon de réagir.
     
  2. La peur. Certains enfants ne veulent plus aller à l'école parce qu'ils ont peur : peur d'un professeur, peur de ne pas réussir (trop de retard et de décalage avec les autres), peur de décevoir et de ne pas être à la hauteur des attentes (les leurs comme celles de leur entourage). C'est trop difficile à supporter et plutôt que de travailler et de risquer d'échouer (ce qui est insupportable car cela met en avant des sentiments de honte et de nullité), mieux vaut ne rien faire (ce qui fait que les mauvais résultats sont mis sur le compte d'une absence de travail plutôt que sur une incompétence). Derrière ce sabotage de la scolarité se cachent souvent des difficultés psychologiques (dépressions…) ou des troubles des apprentissages. Une consultation pédopsychiatrique et un éventuel bilan peuvent alors éclairer les difficultés.
     
  3. L'angoisse. Il y a aussi des enfants qui refusent de se rendre à l'école et présentent de véritables phobies (phobies scolaires). Ce sont généralement de bons élèves, qui aiment et ont envie de travailler mais qui ne peuvent plus se rendre au collège ou au lycée car le seul fait de franchir la porte de l'établissement est source d'angoisses massives, insupportables. Ce refus scolaire anxieux est une pathologie psychique qu'il faut prendre en charge. Un rendez-vous chez le pédopsychiatre s'impose rapidement pour ne pas laisser s'installer ce problème.
     
  4. Le harcèlement. Plus rarement, certains enfants ne veulent plus aller à l'école car ils sont victimes de harcèlements. Dans ce cas, il y a danger ! Il faut toujours se méfier d'un changement de comportement et de modifications d'attitudes chez un enfant.
     

Ces enfants qui ne veulent pas (plus) apprendre

De plus en plus d'enfants ne veulent plus apprendre. Les raisons sont diverses, mais il en est une qui interroge. Dernièrement, j'ai vu en consultation un jeune garçon intelligent. Scolarisé en Troisième, il avait décidé de ne plus travailler. Il séchait un cours sur deux, ne faisait pas ses devoirs, ne travaillait plus. Il n'aimait pas l'école car il pensait que ça ne servait à rien et qu'il pouvait acquérir des connaissances sur Internet. J'ai essayé de le convaincre du contraire mais il avait de solides arguments. Cet enfant me fait penser à ce que décrit M. Serres dans son livre Petite Poucette : des jeunes qui possèdent tout le savoir dans la poche, sur disque dur. Alors pourquoi se casser la tête ? Le problème est que ces enfants se déscolarisent progressivement, accumulent les lacunes et se retrouvent dans des impasses.

À nous, parents et professionnels, d'inventer des solutions pour ces décrocheurs scolaires. Et ils sont nombreux. Une des plus importantes étant d'avoir un réel projet qu'ils investissent et qui les motive. Cela participe de la réussite car on travaille toujours mieux quand on sait pourquoi on travaille.

Quelle attitude adopter face à un enfant qui n'aime pas l'école ?

L'école est une chance pas une menace. Il faut éviter de dramatiser les rentrées scolaires. Ne pas rajouter de l'angoisse (parentale) dans le cartable des écoliers. Il est déjà bien lourd. Il faut aussi s'appuyer sur un(e) copain/copine ou sur un professeur. Beaucoup de choses sont possibles : adaptation/orientation.

En cas de difficultés, accompagner l'enfant. Il faut lui parler et l'écouter, sans le culpabiliser. Retrouver du plaisir. Et si cela persiste, n'hésitez pas à consulter un pédopsychiatre ou un psychologue scolaire pour faire le point et comprendre ce qui se passe, avant de se lancer dans des bilans.